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Poezii Românesti - Romanian Poetry

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La vie sur un perron
proză [ ]
extrait - décalogue

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de [Salvamaria ]

2015-09-30  | [Acest text ar trebui citit în francais]  

Traducere poezie - Traduceri poezii si alte texteAcest text este o traducere.  | 



J’ai ici un décalogue. C’est moi qui l’ai écrit et c’est toujours moi qui l’ai accroché au mur de la salle d’attente. Dès que je lève les yeux, je le vois. Et, chaque fois, je lis un des dix commandements. Chaque fois, un seul, pour me convaincre de le suivre.

Voilà à quoi il ressemble –

Premier commandement: attendre n’importe combien ça prendrait.

Deuxième commandement: attendre n’importe quoi.

Troisième commandement: en échange, ne pas se rappeler n’importe quoi. Bénéfiques sont seulement les souvenirs qui t’aident à vivre dans le présent.

Quatrième commandement: ne compte pas les jours.

Cinquième commandement: n’oublie pas que toute attente est provisoire, même si elle dure toute la vie.

Sixième commandement: répète que le désert n’existe pas. Il existe seulement notre incapacité de remplir le vide dans lequel on vit.

Septième commandement: ne mets pas dans la même marmite la prière et Dieu. La prière est parfois une forme d’espoir de celui qui n’ose pas espérer seul.

Huitième commandement: si cette réflexion t’aide, n’évite pas de reconnaître que tu espères, n’ayant pas autre chose de mieux à faire ou même te protéger des conséquences du fait de ne rien faire.

Neuvième commandement: bénis l’occasion de t’appartenir entièrement. La solitude est une pute qui ne culpabilisera jamais ton égoïsme.

Dixième commandement: rappelle-toi que le paradis a existé, presque sûr, dans une caverne.

Quelle bonne idée j’ai eue d’avoir dressé ce décalogue. Chaque fois que je me trouve en difficulté, je pense à lui. Je le regarde et j’y cherche ainsi le commandement dont j’ai besoin à l’instant même. Et, tout d’un coup, je me reprends. Je ne sais pas ce que j’aurais fait sans mon décalogue. Peut-être que l’homme a pris l’habitude d’attendre des ordres. Il est rendu sourd aux prières. Mais très attentif aux ordres. Avez-vous vu que même Dieu avait utilisé la même méthode? Au lieu de nous illuminer, il a découvert que c’est beaucoup plus commode de nous donner des ordres. Avec dix commandements, Il a tout résolu. Après, il s’est retiré dans la quiétude. Les commandements allaient bousculer celui qui devait être bousculé, tuer celui qui devait être tué, pour que le monde voie bien que le royaume des cieux n’est pas du tout une blague et que, au besoin, les pécheurs seraient menés vers le salut aux coups de fouet.

Mais c’est mieux de laisser aux autres le royaume des cieux et m’occuper de mon désert. Surtout que, honnêtement, moi, je fais partie de ceux qui, lorsque je suis frappé sur les doigts, je ne peux pas dire je suis heureux, mais plutôt ça me fait mal.
Certainement, je n’ai même pas la moitié de saint en moi.

Le plus difficile à suivre et le troisième commandement. Même impossible. Comment faire pour éviter les souvenirs qui m’aident à vivre dans le présent? Qu’est ce qu’il me reste si je chasse les souvenirs? Rien, sinon je reste avec les murs décrépis de la gare, avec les corneilles, les touffes de sumacs amarante tout au long du perron. Non, messieurs, je ne peux pas suivre ce commandement, je me suis donné en vain ce commandement. Il faut que je me souvienne.





*traduit du roumain un extrait (decalog), du roman Viața pe un peron - Octavian Paler

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